Le terme de « martyr » qualifie classiquement des personnes qui se sacrifient au profit d’une cause. Les religions sont friandes de martyrs et la christianisme en vénère pléthore, les plus nombreux étant issus de la période de l’Empire romain mais d’autres cas existent (missionnaires au Japon, guerres civiles en France et en Espagne…). Le mot provient, via le latin martyrus, du grec martus, « témoin ». Le but du martyre (le supplice du martyr) est de promouvoir la cause défendue par le martyr.
Or, depuis quelques temps, se multiplient les démonstrations stupides de militants qui sont complètement contre-productives. Au lieu de promouvoir la cause officiellement défendue, ce type de martyre la ridiculise. Mais le martyr à qui on en fait la remarque rétorque « il faut bien faire quelque chose ». C’est ce que j’appelle un « martyr narcissique ». Et c’est une plaie pour toutes les causes.
Un martyr narcissique « fait quelque chose » et peut ensuite se regarder dans un miroir (ou à la télévision) en disant « j’ai fait quelque chose ». Plus il aura eu d’ennuis, mieux ça sera. Mais ces ennuis ne remettent que très faiblement en cause son petit confort bourgeois parce qu’il ne faut pas exagérer non plus. Les plus virulents des martyrs narcissiques sont actuellement les soi-disant défenseurs de l’environnement avec approche révolutionnaire genre Extinction Rébellion.
Durant des dizaines d’années, un militantisme écologique rationnel a éveillé progressivement les consciences. Aujourd’hui, il semble acquis que tout le monde est conscient que l’humanité appartient à la Terre et que défendre notre propre écosystème est une condition à notre survie en tant qu’espèce. La crise climatique pose bien des soucis au commun des mortels qui se trouve face à un choix difficile : préserver son avenir et altérer son mode de vie ou bien continuer égoïstement en misant sur une sorte de magie (les futures technologies qui n’existent pas encore) pour tout résoudre avant qu’il ne soit trop tard ou sur le fait qu’il sera déjà mort avant l’apparition des vrais problèmes.
Et, là, des abrutis viennent se coller une main au bitume pour bloquer des routes (et créer ainsi des bouchons très polluants) ou lancent de la peinture sur des oeuvres d’art dans les musées. Conclusion tirée par le commun des mortels : l’écologie est un truc de dingues. Donc ne changeons rien à notre mode de vie puisque tout le discours écologique n’est qu’une idiotie. Ces « martyrs » de la cause environnementale (qui, au titre de leur martyre, sont souvent juste astreints au paiement d’amendes ridicules) oeuvrent ainsi contre la cause qu’ils sont censés défendre. Mais « ils ont fait quelque chose ».