Le lobbying des éditeurs a abouti en 1981 au Prix Unique du Livre, prévu dans la Loi Lang (loi n° 81-766 du 10 août 1981 relative au prix du livre), modifiée en 2011 pour que les ouvrages numériques subissent la même règle. Ne doutons pas que les éditeurs de livres en papier y avaient intérêt pour se protéger des grands distributeurs, notamment des distributeurs généralistes comme les hypermarchés.
Mais, au XXIème siècle, cette règle a-t-elle toujours un sens ? Je prétends qu’elle est aujourd’hui contre-productive. Tant les auteurs que les lecteurs auraient intérêt à la liberté des prix. Et le prix unique n’a pas empêché la quasi-disparition des libraires.
Qu’est-ce qui a changé depuis 1981 ? Il serait plus simple de chercher ce qui n’a pas changé ! Internet et, plus largement le triomphe du numérique, a fait exploser les chaînes de valeur traditionnelles. On ne fabrique plus un livre de la même manière. On ne le distribue plus de la même manière. L’objet lui-même a beaucoup changé en pouvant être dématérialisé.
Et les frontières entre types de médias et entre genres s’estompent. Un livre numérique peut être accompagné de vidéos, d’animations… Il peut être lu et vendu sous forme de fichier sonore… Il existe mille variantes dont beaucoup sont sans doute encore à inventer.
Plus important encore est la transformation majeure rendue possible par l’informatique personnelle et le e-commerce, à savoir l’auto-édition de masse. Cette auto-édition peut être menée en réelle autonomie par l’auteur. Et il en résulte une multiplication des canaux de vente.
C’est là que les ennuis commencent.
En effet, chaque canal de vente a ses règles, ses principes, sa chaîne de valeur. Si l’on veut que le prix final soit toujours le même, il faut donc aligner tous les prix sur le plus haut prix nécessaire ! Donc, une vente directe par l’auteur sera au même prix que celle par un libraire. Or un libraire prend une marge d’environ 40%. Et le prix est le premier frein à l’achat d’un livre.
Bien sûr, on peut ruser. On peut ainsi sortir un même ouvrage avec deux identifiants ISBN différents, deux couvertures différentes et ainsi avoir deux éditions à deux prix différents (vente directe et vente indirecte). C’est juste hypocrite mais légal. Et l’astuce a ses limites quand les canaux de distribution se multiplient…
Il serait bien plus simple que l’auteur vende au prix qu’il veut et que chaque intermédiaire fixe le prix que lui-même souhaite en ajoutant sa marge.
Retrouvez cet article dans le recueil Soyons des individus Solidaires.