Sausage Party, de Conrad Vernon et Greg Tiernan, est là pour rappeler aux crétins qu’un film d’animation n’est pas nécessairement destiné à des enfants. Donc, oui, Sausage Party est un film comique et subversif destiné à des adolescents (plus de douze ans) et des adultes, notamment à cause de ses nombreuses scènes explicitement érotiques (une sausage party est d’ailleurs un terme d’argot pour une partouze aux Etats-Unis) mais plus potaches que pornographiques. On est dans la veine d’un Team America, pourtant film de marionnettes (avec une scène pornographique d’anthologie entre les deux héros).
Cela n’a pas empêché tous les intégristes de la planète de crier au scandale, à la corruption de la jeunesse, etc. Pourquoi une telle fureur alors que, rappelons-le, le film est interdit aux enfants ? Parce que la raison est autre, simplement.
Parce que, clairement, ce film est subversif, précisément en visant ces mêmes intégristes de tous poils et, d’une manière générale, tout ce que ces gens là jugent sacré. A commencer par la religion, au sens large. Toutes les religions. Et les guerres de religions, ici représentées par les rivalités et animosités entre les différentes allées du supermarché, chaque catégorie d’aliments ayant sa propre version de la Religion des Humains.
Dès la scène d’ouverture, la messe est dite. Dans un supermarché, les aliments, héros du film, rêvent d’être achetés par des humains pour connaître le paradis au delà des portes du magasin. Quelque chose me dit que le paradis de la cuisine des humains n’est pas si paradisiaque que cela pour des aliments… Le héros principal est d’ailleurs une saucisse mâle très attirée par des petits pains à hot-dog aux formes de vulves. Mais les aliments ont appris qu’ils doivent rester « purs » dans leurs sachets pour avoir droit au paradis. Evidemment, dès la vérité connue, les choses vont un peu changer dans le supermarché.
Les héros, sexués (saucisses, cornichons, etc. sont mâles ; tacos, pains, etc. femelles), découvrent que le bonheur n’est pas dans un hypothétique au-delà mais bien dans une vie commune, heureuse. Une morale athée qui ne peut que faire hurler tous les religieux de la Terre. Surtout que le discours est bien répété encore et encore : pourquoi privilégier des fables par rapport à des réalités concrètes ? Et les héros vont donc découvrir le sexe, hétérosexuel comme homosexuel, sous diverses formes mais aussi la joie de ne plus avoir de dieux (voire de les détruire).
Le discours pourrait être pesant s’il n’était pas associé à une comédie très rythmée avec des personnages fabuleusement drôles en eux-mêmes. Et, techniquement, rien à redire, dans un style cartoonesque assumé.
Sausage Party est donc pleinement jouissif.