The Artist, de Michel Hazanavicius, avec Jean Dujardin, Bérénice Bejo, est muet, en noir et blanc et a obtenu une palme à Cannes. Trois raisons pour s’en méfier, n’est-ce pas ? Un délire esthétisant ? Un caprice d’artiste ?
Pourtant, The Artist est probablement le film le plus extraordinaire depuis des années.
Oui, le muet noir et blanc est, à l’heure de la 3D, un sacré pari. Qui le contesterait ? Jean Dujardin a du retrouver une manière de jouer « avec des grimaces » comme au temps des vrais films muets. Le noir et blanc implique un jeu sur les éclairages et les plans particulièrement soigné. Durant tout le film, on est chez Harcourt.
Bien entendu, le film est sonorisé : la musique, bien sûr, jouée en permanence comme au temps du muet, mais aussi certaines scènes volontairement de rupture, comme le cauchemar de Jean Dujardin. Le travail sur la musique, du coup, est lui aussi extraordinaire. Elle est un acteur à part entière et doit accompagner le moindre geste.
Mais le plus extraordinaire, finalement, c’est que l’on oublie que le film est muet et en noir et blanc.
Les acteurs n’ont pas besoin de parler. Tous méritaient une palme, même le chien. Et on n’a pas besoin de couleur pour être sous le soleil d’Hollywood. L’alternance des scènes dramatiques et des gags, de l’émotion et du rire, rappelle encore le bon vieux temps. Michel Hazanavicius a fait aux films des années 20 ce que Quentin Tarantino a fait pour les séries B des années 50 : plus qu’un hommage, une sublimation.
Et, bien entendu, tout finit bien puisque le cinéma est magie. Ah, n’oublions en effet pas l’essentiel : l’histoire, qui justifie ce pari esthétique : Jean Dujardin est une vedette du muet qui refuse le parlant ; Bérénice Bejo, simple figurante et admiratrice de la vedette, se coule dans le moule de la modernité et devient à son tour une star. Mais elle n’oubliera pas son maître. Les références sont nombreuses, bien sûr. Mais c’est cela, aussi, un hommage.
Chapeau bas, Monsieur Hazanavicius.