La Vie d’Adèle (Chapitres 1 et 2), de Abdellatif Kechiche, avec Adèle Exarchopoulos et Léa Seydoux, est un objet de scandales. Film sur la découverte de l’homosexualité par une jeune fille bien classique d’une part, ses conditions de tournage ont été, d’autre part, aussi largement décriées par les deux actrices principales que par les techniciens.
Palme d’Or à Cannes, encensé autant que décrié, voilà un film qui, à la base, mérite qu’on s’y intéresse. Et on a bien raison.
Je suis habituellement très réservé vis-à-vis des films applaudis durant le Festival de Cannes. La certaine idée du cinéma, tu comprends coco, c’est pas trop ma tasse de thé, fusse-t-elle du Earl Grey.
Bien entendu, ce que l’on est en droit d’attendre en premier lieu d’un film primé à ce niveau, c’est la perfection technique. Il ne peut y avoir ici aucune déception. Les plans sont parfaitement tournés, les lumières magnifiques, les enchainements soignés.
Le soucis habituel, par contre, des films cannois est le scénario indigent associé à un jeu d’acteurs irréaliste. Or, divine surprise, c’est très loin d’être ici le cas.
Le film suit la vie d’Adèle du lycée à ses premières années d’activité professionnelle comme institutrice. Tourné sous la forme de tranches de vie successives, il permet de voir l’héroïne découvrir la sexualité, puis l’homosexualité, la vie de couple et ses déboires… La rupture n’est pas plus tendre parce qu’elle est entre filles ! Les à-côtés, comme les rapports familiaux par exemple, restent cependant les parents pauvres du scénario. Pas une seule mention, par exemple, de la réaction des parents à la découverte de la relation homosexuelle de leur fille alors qu’ils sont visiblement conservateurs et assez coincés.
Et les deux actrices sont absolument magnifiques dans leurs rôles respectifs. Elles permettent de ressentir clairement leurs émotions, en toute subtilité. Les scènes de relations sexuelles ont sans aucun doute été très complexes à tourner, les deux actrices étant hétérosexuelles. Mais le résultat est cependant excellent. Elles s’insèrent parfaitement dans le fil du film, sans scènes prétextes ou inutiles.
Les trois heures de film peuvent paraître un peu longues mais il n’y a rien à retirer.
Enfin, il reste deux questions. On pourra se demander si c’est un hasard que l’héroïne s’appelant Adèle boive du blanc sec durant tout le film. Et on pourra aussi se demander s’il faut une Palme d’Or pour que des bons bourgeois aillent voir un film de cul.